Le texte présenté fut préparé par John Murray pour le comité du chant dans le culte public de Dieu, qui fut élu lors de l’Assemblée générale de son Église, l’Orthodox Presbyterian Church (OPC), en 1944. À cette époque, l’OPC songeait à publier un nouveau recueil de chants incluant des hymnes non inspirés. Dans ce contexte-là, le professeur John Murray proposa à l’Assemblée générale de 1944 d’élire un comité de sept personnes « afin de faire une étude diligente de l’enseignement de la Parole de Dieu et de nos standards subordonnés concernant la question des chants qui peuvent être chantés dans le culte public de Dieu ». Il suggéra aussi qu’entre-temps rien ne se fasse à propos du recueil de chants. Ces deux recommandations furent acceptées. Le comité, dont il a fait partie, présenta donc un rapport partiel lors de l’Assemblée générale de 1946. La section A de ce rapport qui traite de « L’enseignement des standards subordonnés concernant le principe régulateur du culte » est l’œuvre de John Murray, et c’est cette section que nous reproduisons ici.1 Les standards subordonnés dont il est question ne sont autres que les Standards de Westminster.


Il y a un principe clairement exprimé dans nos standards subordonnés, qui a fréquemment été appelé le principe régulateur du culte. Le mot « régulateur » est approprié, car il s’agit d’un principe qui traite de la question suivante : de quelle manière ou de quelles manières devons-nous adorer Dieu ? Quels sont les éléments qui constituent le culte véritable et acceptable de Dieu ? Comment pouvons-nous savoir si la manière dont nous adorons Dieu est acceptable pour lui ?

Pour être tout à fait concret et historique, il existe au moins deux réponses bien définies à cette question dans les Églises chrétiennes. L’une d’entre elles est celle de l’Église romaine, suivie en principe par les luthériens et les épiscopaliens, à savoir qu’il est approprié d’adorer Dieu d’une manière qui n’est pas interdite dans la Parole. Il existe une autre réponse qui s’oppose à cela, à savoir que Dieu ne peut être adoré que de la manière instituée, prescrite ou commandée dans la Parole. Le contraste est évident – l’une dit : ce qui n’est pas interdit est permis, l’autre dit : ce qui n’est pas prescrit est interdit.

C’est en relation à cette question que le principe régulateur doit être compris. On admettra assurément qu’il a droit à une telle dénomination. L’examen suivant de nos standards montrera qu’un principe régulateur est clairement énoncé, et qu’il est précisément formulé en réponse aux questions énoncées ci-dessus.

I. La première déclaration de nos standards subordonnés portant sur cette question est celle de la Confession de foi, chapitre I, section vi, à savoir : « il y a certaines circonstances du culte dû à Dieu, et du gouvernement de l’Église, communes à toutes activités et sociétés humaines, qui doivent être arrangées selon la lumière naturelle et la prudence chrétienne, dans le respect des règles générales de la Parole qui doivent toujours être observées ».

En ce qui concerne cette déclaration, il convient de noter qu’il s’agit de l’une des deux clarifications exprimées en référence à la doctrine selon laquelle : « Tout le conseil de Dieu, concernant tout ce qui est nécessaire à sa propre gloire et au salut, à la foi et à la vie de l’homme, est soit consigné expressément dans l’Écriture, soit doit être déduit de l’Écriture par bonne et nécessaire conséquence ; à ce conseil, rien, en aucun temps, ne peut être ajouté, ni par de nouvelles révélations de l’Esprit, ni par des traditions humaines. » Nous nous intéressons maintenant simplement à l’importance de la clarification ci-dessus en ce qui concerne le culte, dans la mesure où elle s’applique à la doctrine de la suffisance de l’Écriture que nous venons de citer. L’enseignement de cette section appliqué au culte serait le suivant : « Tout le conseil de Dieu, concernant tout ce qui est nécessaire » pour le culte de Dieu « est soit consigné expressément dans l’Écriture, soit doit être déduit de l’Écriture par bonne et nécessaire conséquence », à l’exception de « certaines circonstances du culte […] communes à toutes activités et sociétés humaines, qui doivent être arrangées selon la lumière naturelle et la prudence chrétienne, dans le respect des règles générales de la Parole qui doivent toujours être observées ». Nous pouvons maintenant procéder à l’analyse de cette déclaration.

1. L’exception énoncée ne s’applique qu’aux circonstances du culte. Elle ne peut s’appliquer à aucune partie ou élément substantiels du culte. Elle ne peut s’appliquer à quoi que ce soit qui entre dans le culte lui-même, mais seulement à certaines conditions dans lesquelles le culte est donné ou conduit (1).

2. L’exception énoncée ne s’applique qu’à certaines circonstances. Cette restriction a pour effet de permettre qu’il puisse y avoir des circonstances du culte qui sont, soit consignées expressément dans l’Écriture, soit qui peuvent être déduites de l’Écriture par bonne et nécessaire conséquence.

3. L’exception énoncée ne s’applique qu’à certaines circonstances communes aux activités et sociétés humaines. Il s’agit donc de circonstances qui ne sont pas propres au culte. Il s’agit, par exemple, des circonstances de temps et de lieu. Il peut s’agir aussi de l’ordre et de la durée du service, puisque les sociétés humaines sont mentionnées, il est naturel pour nous de penser aux réunions de telles sociétés dans ce contexte. Le sens évident de cette section de la Confession est que tout ce qui n’entre pas dans la catégorie de « certaines circonstances […] communes aux activités et sociétés humaines » doit se conformer à ce qui est « soit consigné expressément dans l’Écriture, soit doit être déduit de l’Écriture par bonne et nécessaire conséquence », en d’autres termes, l’autorité de l’Écriture est nécessaire pour tout le contenu du culte ; ce pour quoi nous avons l’autorité de l’Écriture est ce qui est consigné expressément dans l’Écriture, ou qui doit être déduit de l’Écriture par bonne et nécessaire conséquence, et vice versa. (2)

II. La déclaration suivante de nos standards subordonnés portant sur la question est celle de la Confession, chapitre XX, section ii : « Dieu seul est le Seigneur de la conscience, et il l’a laissée libre par rapport aux doctrines et commandements des hommes qui, en matière de foi et de culte, sont, en quoi que ce soit, contraires à sa Parole ou en dehors de celle-ci. » Bien sûr, cela n’énonce pas expressément le principe régulateur du culte, mais cela enseigne quelque chose d’étroitement lié à ce principe. En matière de culte, comme en matière de foi, la conscience est libre non seulement de ce qui est contraire à la Parole, mais aussi de ce qui est en dehors de celle-ci. Cela revient à dire, qu’en matière de culte, la conscience n’est liée par rien qui ne soit enseigné ou prescrit dans la Parole, soit par une déclaration expresse, soit par une bonne et nécessaire conséquence. Ce qui n’est pas délivré par la Parole n’a pas d’autorité pour la conscience. La loi pour la conscience dans le culte est celle qui est autorisée par l’Écriture.

Cette section n’aborde pas la question de savoir si le chrétien est libre d’adorer Dieu d’une manière qui n’est pas enseignée dans l’Écriture, ou qui n’est pas autorisée par l’Écriture. Cela aurait été hors du but et de la portée de cette section d’introduire cette question. Cependant, il faut noter attentivement que cette section ne dit pas, ou n’implique pas, que le chrétien est libre d’adorer d’une manière qui soit en dehors de l’enseignement de l’Écriture. Ce que dit cette section, c’est que la conscience est libre de tout ce qui est en dehors de la Parole en matière de culte ; elle ne dit pas que la conscience est libre d’utiliser ce qui est en dehors de la Parole.

Cependant, cette section dit avec insistance qu’inclure dans le culte tout ce qui est en dehors de la Parole, par motif de conscience, c’est trahir la vraie liberté de conscience. Car la section se poursuit : « Ainsi, croire de telles doctrines ou obéir à de tels commandements, par motif de conscience, c’est trahir la vraie liberté de conscience ». Le seul culte qui puisse être rendu par motif de conscience est donc le culte autorisé par l’Écriture, c’est-à-dire un culte non pas en dehors de la Parole, mais un culte autorisé dans la Parole.

Il faut d’ailleurs observer que, dans les questions qui sont en dehors de la Parole, le culte et la foi sont mis au même niveau. Il est pertinent de se demander si, dans l’enseignement de la Confession, on nous concède la liberté d’incorporer dans notre foi tout ce qui est en dehors de la Parole ? Il semblerait que non. Si tel est le cas, ne sommes-nous pas fondés à présumer, pour le moins, que la Confession signifiait que le même principe s’applique au culte, dans les termes même de cette section ?

III. Au chapitre XXI, section i, de la Confession, le principe régulateur du culte est formulé expressément et sans équivoque. Il est dit : « Mais la façon de rendre un culte au vrai Dieu qui lui est agréable, il l’a instituée lui-même, et donc limitée par sa propre volonté révélée, ainsi il ne peut être adoré selon l’imagination et les désirs des hommes, ni selon les suggestions de Satan, ni sous une représentation visible quelconque, ou de quelque autre manière que ce soit non prescrite dans la sainte Écriture. »

Les remarques suivantes peuvent être faites à propos de cette section :

1. Elle énonce un principe qui s’applique à tout culte rendu à Dieu, un principe régulateur de tout culte. Ce principe est que Dieu ne peut être adoré que de la manière ou des manières prescrites, instituées ou révélées dans la Parole.

2. Que le principe régulateur du culte énoncé dans la Confession consiste en ce que Dieu ne peut être adoré que de la manière prescrite dans sa Parole est tout à fait évident d’après les considérations suivantes :

(a) La Confession dit que « la façon de rendre un culte au vrai Dieu qui lui est agréable, il l’a instituée lui-même ». Si elle est « instituée », elle doit être positivement ordonnée, et non laissée à l’invention ou à l’imagination de l’homme.

(b) La manière acceptable est « limitée par sa propre volonté révélée ». Le vrai culte est donc exercé dans les limites de ce que Dieu a révélé comme étant acceptable. De toute évidence, si nous adorons Dieu d’une manière ou d’une façon que l’Écriture ne détermine pas, notre culte ne peut se situer dans ces limites, et il est donc, selon les termes de la Confession, inacceptable.

(c) La Confession est négative et exclusive aussi bien que positive. Dieu « ne peut être adoré selon l’imagination et les désirs des hommes, ni selon les suggestions de Satan, ni sous une représentation visible quelconque, ou de quelque autre manière que ce soit non prescrite dans la sainte Écriture ». Ceci définit l’étendue de la limitation mentionnée dans la clause précédente, ou peut être considéré comme une conséquence découlant de ladite limitation. Elle est tant limitée que les suivantes sont exclues.

Un mot doit être dit concernant la construction de cette dernière partie de la section. À la fin, nous avons les alternatives « sous une représentation visible quelconque » et « de quelque autre manière que ce soit non prescrite dans la sainte Écriture ». La partie de la phrase qui précède immédiatement, à savoir « ne peut être adoré selon l’imagination et les désirs des hommes, ni selon les suggestions de Satan », s’applique aux deux. La construction est telle que, Dieu « ne peut être adoré selon l’imagination et les désirs des hommes, ni selon les suggestions de Satan, ni sous une représentation visible quelconque, ou de quelque autre manière que ce soit non prescrite dans la sainte Écriture ». En vertu de la première négation, l’imagination ou les désirs humains, et les suggestions sataniques, ne doivent pas être pris en compte dans l’exercice de leur ingéniosité afin de visualiser le culte de Dieu. La Confession a apparemment ressenti le besoin de faire une mention spéciale de cette corruption. En vertu de la dernière négation, il y a la déclaration sans équivoque que toute manière non prescrite dans l’Écriture sainte est exclue, et cela signifie que tout élément particulier du culte qui ne peut se prévaloir d’une prescription divine dans l’Écriture est interdit. Pour le dire plus positivement, Dieu ne peut être adoré que de la manière prescrite dans la sainte Écriture.

IV. Le Grand catéchisme, questions 108 et 109, et le Petit catéchisme, questions 50 et 51, énoncent clairement le même principe que nous avons déjà trouvé dans la Confession. Il est énoncé à la fois positivement et négativement dans les deux catéchismes. Nous verrons qu’il est très important de noter le principe d’exclusion ainsi que celui d’inclusion.

Dans la question 108, le Grand catéchisme dit : « Les devoirs requis dans le deuxième commandement sont : de recevoir, d’observer et de garder purs et entiers tout culte et ordonnances religieux que Dieu a institués dans sa Parole », et le Petit catéchisme, question 50, dit : « Le deuxième commandement exige de recevoir, d’observer et de garder purs et entiers tout cultes et ordonnances religieux que Dieu a institués dans sa Parole ». On pourrait soutenir que cette déclaration positive, bien qu’elle rende obligatoire le culte de Dieu institué dans sa Parole, n’exclut pas de manière rigide la possibilité d’adorer Dieu d’une manière qui n’est pas instituée dans la Parole. C’est ici que l’effet du principe d’exclusion, formulé dans les questions 109 et 51 des catéchismes respectifs, devient apparent. La question 109 du Grand catéchisme se lit comme suit : « Les péchés défendus dans le deuxième commandement sont : toute invention, recommandation, prescription, utilisation, et l’approbation de quelque façon que ce soit, de tout culte religieux non institué par Dieu lui-même », et la question 51 du Petit catéchisme : « Le deuxième commandement interdit d’adorer Dieu par des images, ou par une quelconque autre manière qui n’est pas instituée dans sa Parole. »

Toute autre observation semble inutile, si ce n’est pour dire que le culte autorisé et prescris est celui institué ou établi dans la Parole, et que tout culte religieux ou toute manière d’adorer Dieu qui ne sont pas établis dans la Parole seraient caractérisés, dans le langage de la question 108 du Grand catéchisme, comme un « faux culte », et doivent donc être désapprouvés, détestés et combattus, et selon la place et la vocation de chacun, supprimés.

V. Il reste à traiter du « Directoire pour le culte public de Dieu », adopté par la sixième Assemblée générale de l’Église presbytérienne orthodoxe.

Il y a une distinction évidente entre la Confession, le Grand et le Petit catéchisme, d’une part, et les standards de gouvernement, de discipline et de culte, d’autre part. Les premiers occupent une place plus importante dans la constitution que les seconds, dans la mesure où les premiers sont expressément mentionnés dans les formules de souscription, alors que les derniers ne sont pas ainsi mentionnés, même si l’approbation du gouvernement et de la discipline de l’Église est requise dans certaines des formules.

Il convient d’observer que le « Directoire » est « Le directoire du culte public de Dieu », et que sa portée est plus limitée que celle des déclarations de la Confession et des catéchismes dont il a déjà été question.

Les sections pertinentes du « Directoire » peuvent cependant être discutées brièvement.

Au chapitre II, section 1, le Directoire dit : « Les saintes Écritures étant la seule règle infaillible de foi et de pratique, les principes du culte public doivent être tirés de la Bible, et d’aucune autre source ». Dans les sections suivantes, certains de ces principes sont formulés. Le principe régulateur du culte, que l’on trouve dans la Confession et les catéchismes, n’est pas formulé, et il n’y a pas de déclaration sans équivoque l’affirmant ou le niant.

Certaines remarques peuvent cependant être faites.

1. Le chapitre II, section 1, cité plus haut, dit que « les principes du culte public doivent être tirés de la Bible, et d’aucune autre source ». Puisque le principe régulateur du culte s’applique au culte public, et puisqu’un tel principe est énoncé dans la Confession et les catéchismes, il doit s’agir de l’un des principes qui, selon le Directoire, doivent être tirés de la Bible, et d’aucune autre source. Cela signifie que, selon le Directoire, le principe régulateur doit être celui enseigné dans la Parole de Dieu. Ce qu’est cet enseignement, le Directoire lui-même ne le dit pas.

2. Au chapitre II, section 7, le Directoire dit : « Le Seigneur Jésus-Christ n’a pas prescrit de formes fixes pour le culte public mais, dans l’intérêt de la vie et de la puissance dans le culte, il a donné à son Église une large mesure de liberté en la matière. Il ne faut cependant pas oublier qu’il n’y a de véritable liberté que là où les règles de la Parole de Dieu sont observées, et où l’Esprit du Seigneur est présent, que tout doit être fait avec décence et ordre, et que le peuple de Dieu doit le servir avec révérence et dans la beauté de la sainteté ». Il est possible que l’expression « une large mesure de liberté » soit invoquée comme exprimant un principe différent de celui déjà traité dans la Confession et les catéchismes. De plus, il est possible que les rédacteurs du Directoire l’aient voulu ainsi. En ce qui concerne une telle affirmation ou intention, deux choses doivent être dites.

(a) L’expression « une large mesure de liberté » se réfère aux « formes pour le culte public ». Il est tout à fait raisonnable de supposer que les « formes » se réfèrent à quelque chose de différent de ce qui entre dans le cadre du principe régulateur énoncé dans la Confession et les catéchismes. Assument, cette section devrait être interprétée comme se référant au type de formes liturgiques fixes auxquelles les rédacteurs des Standards de Westminster étaient constamment opposés. On peut au moins affirmer que le principe régulateur de la Confession et des catéchismes n’est, du moins, incompatible avec le refus de formes fixes tel qu’il est exprimé dans cette section.

(b) La large mesure de liberté doit être exercée, selon cette section, dans le cadre des « règles de la Parole de Dieu ». Il ne s’agit donc pas d’une liberté sans restriction, et donc, si le principe régulateur est un principe de la Parole de Dieu, la liberté doit être exercée dans le cadre de, et étant compatible avec, ce principe ou cette règle.

(c) Même en supposant que l’expression « une large mesure de liberté » était conçue pour exprimer un principe différent de celui énoncé dans la Confession et les catéchismes, l’occurence de cette expression ne pourrait pas avoir pour effet d’abroger les déclarations claires et sans équivoque des autres standards.

  1. Cette section a été traduite du matériel édité par Sherman Isbell, consultable en ligne, que nous reproduisons avec son autorisation. ↩︎

Une réflexion sur “L’enseignement des Standards de Westminster concernant le principe régulateur du culte – John Murray

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